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Violation du droit à la vie d'un prématuré et dysfonctionnements structurels des hôpitaux publics

Public - Droit public général, Santé
08/09/2016
Viole l'article 2 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme (CESDH), l'État qui n'a pas suffisamment veillé à la bonne organisation et au bon fonctionnement du service public hospitalier, faute notamment d'un cadre réglementaire propre à imposer aux établissements hospitaliers des règles garantissant la protection de la vie des enfants prématurés. Telle est la substance d'un arrêt rendu par la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH) le 30 août 2016.
En l'espèce, faute de place disponible dans l'unité de soins intensifs disposant d'incubateurs et d'équipements de ventilation mécanique, une nouveau-née avait été prise en charge au sein d'un service néonatal. Une fois sur les lieux, le père avait été informé par trois médecins que ce service n'était pas en mesure de dispenser les soins nécessaires et qu'il devait trouver un autre hôpital équipé du matériel nécessaire en vue d'y faire transférer le nourrisson. Les médecins avaient alors co-signé un procès-verbal précisant que la nouveau-née avait été transférée vers leur hôpital en dépit de leur avertissement selon lequel ils n'avaient ni incubateur, ni ventilateur mécanique. Plus tard, l'état de la petite a empiré et elle a été transférée aux soins intensifs où elle a été placée sous ventilation mais est décédée le lendemain.

Les parents avaient alors déposé une plainte pour homicide contre les médecins et administrateurs des deux hôpitaux, les tenants responsables de la mort de leur fille en raison de négligences professionnelles. Ultérieurement, une enquête administrative fut ouverte, laquelle concluait que le corps médical avait prodigué les traitements adéquats et qu'aucune faute ou négligence ne pouvait lui être imputée. À la suite des conclusions de l'inspecteur, le sous-préfet refusa l'ouverture de poursuites pénales à l'encontre des médecins. L'opposition formée par les époux contre cette décision fut rejetée, le tribunal administratif estimant qu'il n'y avait pas d'indices suffisants permettant de soupçonner une négligence professionnelle. Alléguant que les erreurs commises par le personnel médical et les défaillances dans l'organisation des services hospitaliers auraient coûté la vie à leur fille, les parents ont saisi la CEDH.

Pour conclure à une violation de l'article 2 de la CESDH, la Cour juge, en particulier, que le bébé a été victime d'un manque de coordination entre les professionnels de la santé, combiné avec des dysfonctionnements structurels des services hospitaliers, et qu'elle a été privée d'accès à des soins d'urgence adéquats au mépris de son droit à la protection de sa vie. Elle relève qu'un lien de causalité se trouve établi entre le décès du bébé et les problèmes structurels et qu'il a été victime de négligences et de défaillances structurelles ayant eu pour effet de l'exclure des soins urgents adéquats, ce qui s'apparente à un refus de prise en charge médicale de nature à mettre la vie en danger.
Source : Actualités du droit